Les effets néfastes de la gratuité de l’école primaire publique au Cameroun

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Dans la lutte contre l’analphabétisme, la gratuité de l’école primaire est un enjeu majeur dans les pays africains. Tandis que la République Démocratique du Congo (RDC) tente de mettre en place la gratuité de l’enseignement de base pour cette rentrée scolaire 2019-2020, les écoles primaires publiques sont gratuites au Cameroun. Introduite en 2000, cette mesure a eu un effet positif sur le taux d’alphabétisation qui se situe actuellement à environ 80%. Cependant, l’adoption de cette loi a également faciliter l’apparition de nouvelles failles dans le système d’éducation primaire publique.

La multiplication des coûts annexes

Avant 2000, les parents d’élèves devaient débourser la somme de 1500 FCFA pour les frais d’inscription. Depuis la rentrée scolaire 2000-2001, le gouvernement a supprimé l’obligation de régler cette somme pour pouvoir inscrire un élève dans une école primaire publique. Ces frais d’inscription sont à présent à la charge de l’État. Concrètement, les pouvoirs publics ont décidé de supporter certaines charges conformément à la circulaire du 24 juillet 2000 portant organisation des modalités pratiques d’approvisionnement des écoles en matériels didactiques et pédagogiques. Ainsi, chaque établissement scolaire reçoit de la part de l’État du matériel didactique et pédagogique (fournitures scolaires) en fonction du nombre d’élèves inscrits. Un budget de 2500 F/élève est également versé à chaque école primaire publique. Par conséquent, les directeurs d’écoles publiques sont contraints à une gestion minutieuse de cette allocation financière et matériel. Pour s’adapter à cette contrainte budgétaire, certains établissements ont rendu payant les activités extrascolaires et sportives. On assiste à une hausse significative des frais d’association des parents d’élèves (APE). Des parents d’élèves témoignent avoir payé des frais d’impression d’épreuves d’examen ou encore d’avoir cotisé pour la rémunération d’anciens vacataires.

La baisse de la qualité de l’enseignement

La gratuité de l’école avait pour objectif de facilité l’accès à l’éducation de base à tous les enfants. Dès l’application de cette réforme, une hausse des effectifs scolaire au Cameroun. Cependant, le gouvernement n’avait malheureusement pas préparé le terrain à l’entrée en vigueur de cette réforme. Les établissements scolaires publiques se sont retrouvés très vite débordés par les effectifs. Dans certaines grandes villes (Yaoundé, Douala), on peut compter jusqu’à 120 élèves par classe. Le nombre de salles de classe est généralement insuffisant pour le nombre d’élèves. Pour y remédier, le gouvernement n’a cessé de construire de nouvelles de salles classes. D’autre part, les enseignants qualifiés se font rares surtout dans les zones rurales. Le métier d’instituteur souffre d’un manque d’intérêt à cause du niveau de rémunération et des indemnités en cas d’affectation hors provinces d’origine. La gratuité de l’école a donc accentué la submersion des salles de classe et le manque d’enseignants qualifiés. C’est pourquoi, la taux d’alphabétisation a progressé mais la qualité des enseignements ne suit pas cette tendance.

Malgré la gratuité des établissements scolaires publiques, nombreux sont les parents d’élèves qui choisissent d’inscrire leurs enfants dans des écoles privées. Les frais d’inscription dans ces établissements scolaires privés coûtent en moyen 30 000 FCFA. Au final, la gratuité de l’éducation de base au Cameroun n’est pas encore une réalité. Plusieurs aménagements sont nécessaires pour assurer à la fois la gratuité et la qualité dans les écoles primaires publiques au Cameroun.

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