Les centres commerciaux… ces lieux de convergence de marchandises particulièrement variées et bien organisés en rayons, types, et même parfois saisons, font de plus en plus partie du quotidien des africains. Mais encore, les grandes enseignes spécialisées n’hésitent plus à installer leurs grandes surfaces, super et hypermarchés sur les territoires africains, où le niveau de vie ne cesse de croître.
L’émergence d’une classe moyenne active, la cible idéale
Les pays africains à forte densité de population voient émerger, depuis la dernière décennie, une classe moyenne active aux goûts bien affirmés. Leurs habitudes de consommation s’occidentalisent un peu plus, et ceci est bien visible dans leurs interactions au quotidien, notamment sur les réseaux sociaux.
Passer du temps dans un supermarché, qui se transforme progressivement en un lieu de plaisance, devient aussi un signe d’appartenance à une certaine classe. Outre les “avantages” qu’offrent ces structures par rapport aux marchés traditionnels : sécurité, propreté, heures de fermeture tardives, etc. Ces derniers veulent également jouer sur la fibre “locale” en proposant des produits réalisés et collectés sur place, affirmant des collaborations avec des producteurs locaux.
Est-ce pour autant que les “petits commerçants” sont en difficulté ?
Les centres commerciaux : une question de culture
Il faut dire que sur le plan culturel, les centres commerciaux ne sont pas “une grande tradition” africaine. On a l’habitude du marché dit “traditionnel”.
Les personnes d’une certaine génération n’ont pas pour réflexe de se tourner vers les centres commerciaux pour faire des achats. Les habitudes avec les “asso” et “tantie”, les “amies” commerçantes du marché et les boutiquiers du coin de la rue avec qui on se “chamaille” volontiers pour un doigt de plantain ou pour un problème de petite monnaie et avec qui on rigole la seconde d’après, c’est quelque chose dont on ne se détache pas aussi “facilement”, surtout quand on sait qu’on peut repartir avec la marchandise même si on se retrouve à court d’argent, pour venir payer le lendemain ou quelques jours plus tard.
Cette chaleur et ces interactions ne sont pas des éléments qu’on retrouve aussi “naturellement” dans ces centres commerciaux où les prix sont non négociables et qui ont, dans l’esprit de beaucoup, l’image de lieux inaccessibles et réservés à une certaine classe d’individus. Les centres commerciaux gagneraient-ils à travailler la perception que “la masse” semble avoir d’eux ? Il faut savoir que malgré leur présence de plus en plus forte, les petits commerçants semblent toujours avoir leur place bien établie.
Les petits commerçants : top of mind ?
L’être humain, par essence, a horreur du changement. On a facilement pour réflexe de s’adresser au petit commerçant du coin pour faire un achat qu’aller forcément au supermarché, même si ces derniers travaillent leur proximité en multipliant les espaces pour assurer un maillage du territoire efficace. En observant ce qui se fait de manière empirique, chacun de ces acteurs semble avoir sa place. On va au supermarché pour acquérir certains produits spécifiques qui ne sont pas toujours dans les rayons des petits commerçants : gels douche, vins, etc. Chaque acteur comble des besoins que l’autre n’intègre pas toujours dans son offre.
Les centres commerciaux ne sont pas forcément la destination première pour les produits de consommation courante, quand bien même ils pratiqueraient des prix concurrentiels.
Si les nouvelles habitudes de consommation s’installent progressivement dans le mindset des africains (les centres commerciaux constituent, dans l’esprit et dans la pratique, quelque chose d’importé), il n’en demeure pas moins que les petits commerçants font partie du quotidien de l’individu moyen et offrent une expérience humaine qu’il est probablement impossible de reproduire en centres commerciaux. Qui s’en passera ?
Par Paul Emmanuel NDJENG